Philippe Petit traverse le World Trade Center, « Le funambule » (août 1974)
L’exemple de la traversée des deux tours du World Trade Center de New York réalisée par le funambule Philippe Petit le 7 août 1974 est bien sûr emblématique. Projetée plusieurs années auparavant devant les plans du bâtiment découvert dans un magazine, elle va ensuite devenir l’objet d’une démarche obsessionnelle de la part du Français et le conduire à des proto-traversées, dans son jardin, puis avec les tours de Notre Dame de Paris (1971) et celles du Pont du Port (Harbour Bridge) à Sydney (1973). La traversée « proprement dite » aura lieu sur des tours encore en chantier et donnera lieu à huit allers-retours à 417 m au-dessus du sol. La disparition des Twin Towers le 11 septembre 2001 inscrit ce traverser en quelque sorte hors du temps et le fameux documentaire du Britannique James Marsh (Man on a wire, traduit en français « Le funambule » (2008)) en fait désormais une méta-traversée. Ces différentes traversées ne doivent pas être appréhendées comme une succession historique, mais comme un empilement de durées et d’espaces. L’agencement spatial de tous ces actes et de toutes ces expériences spatiales fait le traverser, lui donne sens spatial et valeur sociale.
Se reporter éventuellement à l’article « Traverser l’espace » dans la revue « Espacestemps.net« .
Extraits de « Man on a wire » (2008) :
Film « Man on a wire », de James Marsh, 2008, voir le film documentaire dans son intégralité (94’) : ici
Pierre Patrolin, La traversée de la France à la nage
Dans le cadre d’un exercice littéraire, Pierre Patrolin (2012) appréhende lui cette altérité-obstacle et cette altérité-identité dans un espace revendiqué comme La traversée de la France à la nage (2012). Récit est donné à lire d’une expérience spatiale. Le projet contenu dans le titre (« la première chose écrite ») amène l’auteur à envisager, à « assumer » toutes les difficultés spatiales qu’il contient. Celui-ci dit suivre le protagoniste : « je le suis plus que je suis le ». L’intérêt de l’exercice repose sur ses dimensions fictionnelles, c’est-à-dire sur les contradictions apparentes entre une spatialité dynamique et un espace « réel », survalorisant le réseau hydrographique construit autour du Massif Central. Patrolin est ainsi « attaché à ce que tout soit vrai » (« je ne pouvais faire passer la Loire à Paris »), y compris à grande échelle, avec la retranscription précise de tel pont ou de tel méandre. Son chemin d’eau doit donc composer, non seulement contre la gravité du support physique, mais aussi avec les innombrables coupures et obstacles à une circulation fluide : déversoirs, rapides, goulets, barrages et aussi interdits frappant la circulation nautique dont il nous dit qu’ils sont les plus rugueux à Paris ! Le principe l’amène également à renoncer au mode traditionnel de déplacement, debout ou assis, pour un mode immergé (dans tous les sens du terme) et une position couchée, ce qui le conduit à pénétrer le paysage pour l’appréhender et à le regarder « d’en bas ». En ce sens, l’expérience spatiale passe bien sûr par le corps. La traversée devient donc un roman d’aventures restituées à la première personne. C’est un acte spatial individuel, mais pas solitaire, puisque le héros trouve un miroir transitionnel et un partenaire dans son propre baluchon et qu’il rencontre un certain nombre de personnages, dont les animaux ne sont pas les moins nombreux. Au final, c’est une diagonale à laquelle nous invite Patrolin, entre le Pont du Roi sur la Garonne et la Meuse. Interviewé, il nous fait cet aveu : je traverse « la France » parce que j’écris en français… Tout est dit et finalement rien n’est effacé. Son traverser de l’espace français laissera bien une trace, a minima romanesque et littéraire.
Se reporter éventuellement à l’article « Traverser l’espace » dans la revue « Espacestemps.net« .
De Moscou à Vladivostok, le transsibérien (Documentaire Euronews, mai 2013, 5’07’’)
Reportages « De Moscou à Vladivostok, le Transsibérien révèle l’âme russe » (en haut), Euronews 27 mai 2013 5’ 06 ‘’. Le procédé met ici en récit un traverser inscrit dans son exotisme et dont le potentiel de simulation projective est revendiqué, en particulier pour des traverser touristiques.
La Grande Traversée : randonnée en moto Royal Enfield en Inde du sud (2’07’’)
Dès lors que sont mobilisés des moyens de transport motorisés, une tendance à la survalorisation du véhicule est régulièrement détectable en fonction de ses qualités « vintage » : « La traversée de Paris en Anciennes », le fameux rallye de véhicules anciens organisé par une association de Vincennes ou bien encore les innombrables traversées en moto de marque Harley Davidson ou ici en Royal Enfield dans le sud de l’Inde avec une traversée proposée comme telle par l’opérateur Vintage Rides.